Points saillants des décisions dignes d'attention

Décision 1932 04
2014-11-13
S. Martel
  • Charte des droits (droits à l'égalité)
  • Base salariale (récidives) (PÉF)
  • Charte des droits (valeurs édictées dans la Charte)

Le travailleur avait subi une lésion au dos en août 1996. Il était retourné au travail en septembre 1996. Il avait eu une récidive en novembre 2001. En 2002, la Commission lui avait reconnu le droit à une indemnité pour perte non financière (PNF) de 24 %. La Commission lui avait aussi reconnu le droit à une indemnité pour perte économique future (PÉF) fondée sur ses gains au moment de l’accident de 1996, et ce, à compter de juillet 2002. Le travailleur a interjeté appel parce que son indemnité pour PÉF devait selon lui être fondée sur ses gains plus élevés au moment de la récidive de 2001.

La vice-présidente a été d’accord avec la décision no 701/04R que le paragraphe 43 (3) de la Loi sur les accidents du travail (Loi d’avant 1997) ne permet pas l’utilisation de gains d’emploi actualisés pour déterminer l’indemnité pour PÉF après une récidive. Les indemnités pour PÉF sont calculées à partir des gains moyens nets d’avant la lésion, soit la lésion de 1996 en l’espèce.
Le travailleur a soulevé un argument fondé sur la Charte des droits. La vice-présidente a noté que le travailleur n’avait pas donné avis aux procureurs généraux du Canada et de l’Ontario, conformément à la Directive de procédure : Procédure pour soulever une question en vertu du Code des droits de la personne ou de la Charte des droits et libertés. Le travailleur soutenait qu’un tel avis n’était pas nécessaire parce qu’il soulevait un argument fondé sur les valeurs édictées dans la Charte, plutôt que de contester la validité constitutionnelle d’une disposition législative.
Dans la décision no 480/11I, le Tribunal traite de la distinction entre une contestation de la validité constitutionnelle d’une disposition législative et un argument fondé sur les valeurs édictées dans la Charte. Quand il existe une ambiguïté véritable entre des interprétations plausibles d’une disposition législative, il faut recourir à des moyens d’interprétation externes, y compris les valeurs édictées dans la Charte. Quand les observations fondées sur la Charte remettent en question la validité constitutionnelle d’une disposition législative qui n’est pas véritablement ambiguë, il faut en aviser les procureurs généraux.
La vice-présidente a estimé que la Loi d’avant 1997 indiquait clairement que les prestations pour PÉF versées par suite d’une récidive sont fondées sur les gains au moment de la lésion. Il ne s’agissait donc pas d’un cas d’ambiguïté véritable entre deux interprétations plausibles. Par conséquent, il ne s’agissait pas d’une situation faisant intervenir les valeurs édictées dans la Charte, mais plutôt d’une contestation de la validité constitutionnelle d’une disposition législative. L’argument fondé sur la Charte ne pouvait donc pas être soulevé pour le moment parce qu’un avis n’avait pas été donné conformément à la directive de procédure du Tribunal.
De toute manière, la vice-présidente a conclu qu’il n’y avait pas eu traitement discriminatoire. Le travailleur soutenait qu’il y avait traitement discriminatoire entre les travailleurs temporairement invalides et ceux invalides de façon permanente. La vice présidente a toutefois conclu que les travailleurs temporairement invalides et ceux invalides de façon permanente ne sont pas traités différemment en ce qui concerne le versement de prestations relatives à une invalidité temporaire. Ils reçoivent tous des prestations temporaires calculées en fonction de leurs gains au moment de l’accident ou de leur emploi le plus récent, selon le plus élevé des deux montants. Les prestations d’invalidité temporaire deviennent une indemnité pour PÉF seulement quand le travailleur commence à avoir droit à une indemnité pour une déficience permanente ou quand son invalidité temporaire persiste pendant plus de 12 mois. Comme l’indemnité pour PÉF est de plus longue durée et de nature plus permanente, il n’est pas nécessairement injuste de la calculer en fonction des gains d’avant l’accident.
La vice-présidente a par ailleurs noté que le traitement différent allégué concernait le montant d’une indemnité plutôt que l’accès à cette indemnité. Le calcul contesté n’avait pas pour conséquence de priver un travailleur d’une autre indemnité, comme une indemnité pour PNF ou de prestations de soins médicaux. La Commission ne perpétuait donc pas des concepts d’invalidité préjudiciables ou stéréotypés.
L’appel a été rejeté.