Points saillants des décisions dignes d'attention

Décision 463 22
2022-05-04
C. Huras - G. Burkett - J. Provato
  • Du fait de l’emploi (bagarre)
  • Au cours de l'emploi (bagarre)
  • Au cours de l'emploi (auto-retrait du cours de l’emploi) (inconduite)
  • Inconduite (provocation)
  • Droit initial (droit à indemnisation)
  • Fracture (bassin)
  • Fracture (hanche)

Le travailleur a interjeté appel de la décision du 4 juin 2021 dans laquelle le commissaire aux appels a refusé de lui reconnaître le droit initial à une indemnité pour une fracture de la hanche gauche subie le 16 novembre 2020 au motif qu’il s’était lui-même retiré du travail en étant l’agresseur et en ayant provoqué l’altercation qui a causé sa lésion.

L’appel a été accueilli.
Le comité a tout d’abord déterminé si le travailleur était en cours d’emploi le 16 novembre 2020. Il a conclu que le travailleur était en cours d’emploi. L’incident initial entre le travailleur et son collègue avait été causé par une dispute au sujet d’un crayon utilisé pour signer des documents sur le chantier. Le comité a estimé qu’il s’agissait d’une activité professionnelle raisonnablement connexe à l’emploi. Il a conclu que le deuxième incident, ayant entraîné l’accident, avait été causé par une querelle et qu’il correspondait probablement aux habitudes et pratiques de ce lieu de travail particulier. Le comité a conclu que l’activité découlait donc de l’emploi. À l’appui de cette conclusion, le comité a noté le témoignage dans lequel le travailleur a indiqué que les plaisanteries et les jurons faisaient partie des habitudes et pratiques de ce lieu de travail particulier.
Le comité a ensuite conclu que ces incidents constituaient une « bagarre » aux termes du document no 15-03-11 du MPO étant donné que le deuxième incident avait dégénéré en altercation physique.
Le comité a ensuite examiné la question de savoir si le travailleur avait droit à des prestations conformément aux dispositions du document no 15-03-11 du MPO qui prévoient une analyse en deux étapes. La première étape consiste à déterminer si la bagarre porte sur une question personnelle ou porte sur le travail. S’il s’agit d’une bagarre portant uniquement sur une question personnelle, on considère que le travailleur se retire du cours de l’emploi et il n’a donc pas droit à des prestations. Or, s’il s’agit d’une bagarre portant uniquement sur le travail, on passe à la deuxième étape de l’analyse consistant à déterminer si le travailleur était l’agresseur ou le provocateur de la bagarre ou s’il était un simple spectateur.
Le comité a noté que les événements ayant entraîné une altercation étaient raisonnablement connexes à l’emploi. Il était donc convaincu que la bagarre ayant causé la lésion du travailleur portait uniquement sur le travail. Pour ce qui est du deuxième critère, le comité a conclu que le travailleur était l’agresseur ou le provocateur de la bagarre. Il a estimé que la dispute initiale avait été initiée par le travailleur et que les jurons étaient provocateurs. Il a reconnu que le travailleur n’avait peut-être pas eu l’intention de provoquer une bagarre, mais que le fait d’arracher un crayon des mains de son collègue, probablement avec force, et de le lancer 7 mètres plus loin correspond à un acte d’agression. Le comité a noté qu’il s’agissait d’éléments de preuve démontrant que le travailleur a participé à une bagarre ou a manifesté sa volonté de participer à une bagarre. Aux termes du document no 15-03-11 du MPO, ceci supprimerait le droit du travailleur à des prestations.
Cependant, le comité a noté que le travailleur pouvait recevoir des prestations aux termes de l’article 17 de la Loi de 1997, car sa lésion a entraîné une déficience grave et découle uniquement de son inconduite en relançant son collègue verbalement et physiquement. Le comité a noté que l’espèce cadrait avec de nombreuses décisions du Tribunal ayant conclu qu’un travailleur pouvait ne pas avoir droit à des prestations si l’activité constituait une inconduite grave et volontaire et si elle était la seule cause de la lésion, sauf si la lésion était grave.
Le comité a suivi l’analyse de la décision no 624/16 concernant l’article 17 de la Loi de 1997, selon laquelle il faut donner la priorité aux dispositions législatives qui fournissent clairement une exception aux travailleurs gravement blessés malgré leur inconduite. Le comité a appliqué cette conclusion en l’espèce. Il a estimé que cette interprétation cadrait avec le document no 15-03-11 du MPO étant donné que la politique indique qu’un « travailleur qui subit une lésion corporelle en raison de sa participation à une bagarre, des jeux brutaux ou des plaisanteries au travail n’a généralement pas droit aux prestations de la Commission ». Il a noté que l’utilisation du terme « généralement » dans la politique semble indiquer que, dans certains cas où la lésion du travailleur a entraîné une déficience grave, les travailleurs peuvent avoir droit à des prestations de la Commission. Il a aussi noté que la fracture de la hanche du travailleur était grave, car elle nécessitait une intervention chirurgicale envahissante et elle avait entraîné une déficience grave.
Le comité a conclu que le travailleur avait le droit initial à une indemnité pour une lésion à la hanche gauche subie le 16 novembre 2020. Les questions de la nature et de la durée des prestations découlant de cette décision ont été renvoyées à la Commission pour règlement, sous réserve des droits d’appel habituels.