- Causalité (preuve médicale) (norme de preuve) (stress mental)
- Travailleur à la protection de l’enfance
- Stress mental (chronique)
La seule question en appel était celle de savoir si le travailleur avait droit à une indemnité relativement au stress chronique.
L’appel a été accueilli.Le comité a noté que le critère d’admissibilité prévu dans la politique relative au stress chronique n’exige pas que l’événement déclencheur soit objectivement traumatisant, soudain ou imprévu. De plus, la présence d’une réaction aiguë à un événement déclencheur spécifique n’est pas nécessaire. Au contraire, le droit à une indemnité pour stress chronique exige qu’un ou plusieurs facteurs de stress importants en milieu de travail soient la cause prédominante de l’état psychiatrique. En appliquant les dispositions de la politique aux faits du présent cas, le comité a conclu que les tâches régulières du travailleur à la protection de l’enfance en première ligne étaient des facteurs de stress importants en milieu de travail.Le comité a noté que la politique relative au stress chronique stipule également qu’un facteur de stress en milieu de travail « est généralement considéré comme important s’il est d’une intensité et (ou) d’une durée excessives par rapport aux pressions et aux tensions normales que subissent les travailleurs dans des circonstances semblables ». La politique souligne également qu’une demande d’indemnisation pour stress chronique présentée par un travailleur qui exerce une profession où le niveau de stress est élevé « ne devrait pas être refusée simplement parce que tous les travailleurs qui occupent un emploi dans cette profession ou catégorie d’emplois au sein de cette profession sont normalement exposés à un niveau élevé de stress ». Selon cette politique, les emplois soumis à un niveau élevé de stress courant présentent l’une ou l’autre des caractéristiques suivantes, ou les deux : a) responsabilité en ce qui concerne des questions de vie ou de mort ; b) travail courant dans des circonstances extrêmement dangereuses.Le comité a déterminé que le travail d’un travailleur à la protection de l’enfance en première ligne implique une responsabilité en ce qui concerne des questions de vie ou de mort, car ses décisions ont un impact majeur sur la vie ou le décès d’un enfant. Ainsi, le comité a conclu que le travail du travailleur dans le domaine de la protection de l’enfance impliquait un degré élevé de stress courant.De plus, pour évaluer le droit à une indemnité pour stress traumatique, la jurisprudence du Tribunal indique généralement de déterminer si les événements en question seraient considérés comme traumatisants pour un travailleur moyen dans le bassin de main-d’œuvre général, et non pour un travailleur moyen qui effectue le même type de travail (voir la décision no 1839/07). En l’espèce, les tâches régulières du travailleur entraînaient des niveaux de stress particulièrement élevés ainsi que des risques de sécurité, de la violence potentielle et parfois des menaces de violence. De plus, le comité a reconnu que ces facteurs de stress importants en milieu de travail ont amené le travailleur à développer une réaction de stress, à savoir la dépression et l’anxiété, observée dès 2003. Ce n’est qu’en 2007 que le conflit entre le travailleur et son superviseur a été signalé, ce qui contribuait aux problèmes de dépression et d’anxiété existants en raison de ses tâches de travail et aggravait ces troubles. Le comité a noté que, bien que les troubles du travailleur aient été aggravés par le conflit interpersonnel avec son superviseur, son droit à une indemnité n’était pas prescrit, car l’état de stress était évident et diagnostiqué des années avant le début de ce conflit. Selon son psychiatre traitant, c’était aussi le résultat de ses préoccupations en ce qui concerne sa sécurité personnelle, les menaces perçues et réelles de violence dans le cadre de son travail en première ligne, et la détresse associée à la nature même du travail. Le comité a donc conclu que le travailleur avait droit à une indemnité pour stress chronique.Le représentant de l’employeur a fait valoir que les notes cliniques au dossier indiquaient que le travailleur était en mesure d’accomplir toutes ses fonctions en 2008 lorsqu’il travaillait sous un autre superviseur. Le comité a noté que sa capacité de travail n’était pas pertinente à la question du droit initial. La question dont le comité était saisi était celle de savoir si le travailleur avait subi une lésion attribuable au stress en raison d’un ou de plusieurs facteurs de stress importants en milieu de travail étant la cause prédominante de l’apparition du trouble. Pour toutes ces raisons, le comité a conclu que le travailleur avait subi une telle lésion.Enfin, le représentant de l’employeur a cité la décision no 1187/20, qui souligne que le critère de la « cause prédominante » énoncé dans la politique sur le stress chronique de la Commission ne cadre pas avec le critère de causalité habituel du Tribunal, c’est-à-dire le « facteur contributif important ». Étant donné que le comité avait conclu que les tâches du travailleur étaient des facteurs de stress importants en milieu de travail, étant ainsi la cause prédominante de son état de stress, il n’était pas nécessaire, en l’espèce, de tenir compte du critère divergeant de celui du Tribunal pour évaluer le lien de causalité, comme établi dans la politique de la Commission sur le stress chronique.En résumé, les opinions médicales et les conclusions de la décision no 371/17I ont été formulées dans le contexte de la politique antérieure relative au stress, qui exigeait une réaction aiguë à un événement soudain et inattendu, ainsi qu’un événement objectivement traumatisant, afin de reconnaître le droit à une indemnité. Les critères ouvrant droit à une indemnité pour stress mental ont changé lors des modifications apportées à compter de janvier 2018. Ces modifications ont supprimé l’exigence selon laquelle un événement déclencheur objectivement traumatique devait être soudain et inattendu pour reconnaître le droit à une indemnité pour stress traumatique et pour établir le droit à une indemnité pour stress chronique dans les cas où les facteurs de stress en milieu de travail étaient importants, permettant de reconnaître le processus de lésion. Pour les raisons énoncées ci-dessus, le comité a conclu que le travailleur avait droit à une indemnité pour stress chronique. Les questions de la nature et de la durée des prestations découlant de ce droit ont été renvoyées à la Commission pour règlement, sous réserve des droits d’appel habituels.